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Corrosion
Jon Bassof traduit par Antoine Pons
Gallmeister 2016
Voilà un roman dont la construction inhabituelle est tout à fait remarquable. Il parait évident que les impressions de lecture seraient tout à fait différentes si le début ne se trouvait dans la fin et vice versa. Ou bien encore, les méprises voulues dont découle cette construction interrogent sur les manières de lire. Sur les images que créent les mots. Sur la partie de soi qui s’implique dans l’acte de lire. Les attendus, les présupposés…
Difficile de ne pas paraître confus… Pour être plus clair il faudrait « spoiler » ce qui serait inqualifiable.
Tentative de dévoilement partiel quand même.
Un vétéran d’Irak au visage abominablement détruit arrive et sème la perturbation dans une petite ville du fin fond de l’Amérique.. Sa laideur, sa folie susceptible, ses délires… tout cela bien retenu, bien ficelé, enfoui dans le silence qui entoure fatalement les gens défigurés comme lui.
Qui est-il ? D’où vient-il ? Le shérif aimerait bien qu’il reparte. Peu importe les réponses. Il pressent le pire… et il a bien raison.
Joseph Downs, à moins qu’il ne soit quelqu’un d’autre ? porte la mort sur lui, et la distribue avec une froideur effroyable. Pour cela, il a des raisons qu’on découvre dans le seconde partie qui révèle la construction d’un psychopathe dans toute sa désespérance.
Certains auteurs vous bâtissent des climats d’horreur avec des débauches d’hémoglobine. Jon Bassof œuvre avec une belle économie de moyen, l’ellipse remplaçant la ligne droite dans son raisonnement. Toujours pris à contre-pied, le lecteur doit s’adapter.
Passées les trente-quarante premières pages, on navigue de stupeur en désolation, et ce n’est pas de la littérature de chochotte ! C’est une peinture de l’Amérique profonde comme écrin de la folie, dont on peine à croire qu’elle ne remonte pas à la préhistoire du Far West. Mais pourtant non. C’est aujourd’hui, c’est là-bas, mais ça pourrait aussi bien être ici…